Par Gaby Dufresne-Cyr
Le jappement est un problème courant. Souvent incompris, ce comportement normal crée des conflits entre voisins. Avant de répondre aux questions «D’où vient ce comportement?», «Pourquoi est-il si difficile, voire impossible, de faire taire Fido?» et «Est-ce que certaines races sont prédisposées au jappement?», discutons brièvement de l’origine de ce canidé afin de mieux répondre à ces questions.
Historiquement, le chien a évolué du loup en exploitant une nouvelle niche écologique, c’est-à-dire les dépotoirs d’humains sédentarisés. En quelques générations, cet hybride a effectué une mutation sur deux plans. Physiquement, il a commencé à avoir deux périodes de chaleurs, des oreilles tombantes, différentes couleurs de pelage, un plus gros corps et un plus petit cerveau. Au niveau comportemental, la transformation fut remarquable; il devint charognard, démontrait moins d’agressivité, se mit à japper et la sociabilité envers les humains devint pratique commune.
Le jappement, chez le loup, est un comportement instinctif d’avertissements rarement utilisé. Chez le chien primitif, ce comportement avait deux fonctions. Premièrement, il servait à avertir les intrus que quelqu’un exploitait cette partie du dépotoir et deuxièmement, il éloignait les intrus de son territoire. Voyant l’efficacité de ce comportement, l’humain l’exploita. Le chien qui jappe est sélectionné, isolé et nourri plus abondamment. Cette sélection a eu comme effet de renforcer le jappement chez le chien domestique.
De la théorie à la science
Chez l’espèce Canis, le jappement est un comportement instinctif qui est géré par le cerveau primitif. Autrement dit, le chien perçoit un stimulus, les sens envoient cette information au cerveau qui passe la commande, via l’amygdale, au cervelet. En retour, ce dernier émet la commande de japper. Cette réaction, imprégnée dans cette région via une association entre la génétique et l’environnement, est permanente et ne peut pas être retirée du répertoire. Elle peut seulement être modifiée en plus ou en moins c’est-à-dire augmentée ou réduite en intensité. Bref, le cerveau ne contrôle pas le jappement, il ne fait que le déclencher.
Deux possibilités s’offrent pour cesser le jappement; punir le comportement ou le prévenir. Punir le jappement est quasi impossible car pour ce faire le stimulus aversif doit être suffisamment puissant pour cesser le jappement du premier coup et ensuite empêcher l’animal de le manifester à nouveau. Très peu de personnes peuvent correctement administrer une punition en temps et en intensité, ce qui à long terme augmente le problème. Comme le jappement est motivé par un mécanisme instinctif très puissant, il est préférable de le prévenir.
Il faut savoir que la sélection artificielle favorise le jappement. Certains groupes de chiens tels que les terriers, chiens courants, teckels et chiens de compagnie ont été développés pour leurs caractéristiques vocales. Les groupes de lévriers, rapporteurs, chiens d’arrêt, spitz, molossoïdes et bergers sont reconnus pour leur silence. Il est évident que le jappement varie non seulement d’un groupe à l’autre mais d’un individu à l’autre. Un sujet peut être plus vocal que son frère ou sa sœur, le tout dépend habituellement du tempérament et de l’environnement. L’homme a développé le jappement chez le chien et il est rapidement devenu un comportement normal chez celui-ci. Seules une connaissance génétique et une sélection rigoureuse peuvent contrôler son intensité.
La question devient alors pourquoi voudrions-nous retourner en arrière? Le jappement est utile et vouloir l’éliminer est basé sur un désir égocentrique de contrôle influencé par notre incapacité de comprendre et d’accepter ce qui est différent de nous.